Un message impérial

Un message impérial

Posté le 06 Octobre 2012

Je viens de lire (ou de tenter de lire) « L’impensable hasard » de Nicolas Gisin.

Bien que l’auteur, brillant théoricien en physique quantique, d’entrée se défende de vouloir nous infliger d’abscons développements mathématiques, l’ouvrage commence par la description sur 20 pages du « jeu de Bell » : a+b = x.y. ça semble simple. ça ne l’est pas. Tout juste pouvons nous imaginer ce à quoi nous avons échappé.

On démontre que deux individus « totalement » séparés (par des millions de kilomètres) ne peuvent dans le meilleur des cas donner simultanément la même réponse au jeu de Bell que trois fois sur quatre. S’ils « gagnent », c’est à dire, si leur score est supérieur, c’est que quelque chose les unit par delà même la possibilité de communication matérielle. C’est qu’ils sont liés par une corrélation « non locale ». En tout cas non prévue par l’espace – temps relativiste de ce cher Albert (vous savez : « Dieu ne joue pas aux dés »).

Mais il existe dans la réalité (c’est la spécialité de l’auteur) des jeux de Bell expérimentaux utilisant des particules lancées comme des bolides à des vitesses proches de la lumière, dont les résultats démontrent que deux systèmes trop éloignés pour pouvoir communiquer entre eux sont susceptibles de donner le même résultat, pourtant complètement aléatoire, lorsqu’on les interroge.

En physique quantique, c’est le principe d’intrication. Deux particules intriquées, parties dans des directions opposées et parcourant des milliards de kilomètres, sont capables d’avoir les mêmes réactions, le même savoir, vis à vis de phénomènes complètement déterminés par le hasard (en fait, non déterminés).

Je ne prétends pas avoir tout saisi, avec mon seul bagage théorique de médecin anesthésiste. Mais ce mystère, maintenant démontré, de la physique quantique, un véritable changement de paradigme, car défiant la logique, aussi incroyable que le principe de superposition des états (le fameux chat de Schrödinger) et qui dans un sens confine à la foi (re-ligere),
m’a fait songer à mon texte préféré de Kafka : un message impérial.

C’est tout Kafka dans quelques lignes, l’impossible communication, la ville impériale qui a entassé « les montagnes de son propre limon » entre l’empereur et toi, et pourtant, quand vient le soir, deux cœurs éloignés peuvent battre au même rythme…

Share Button