Petits suicides finlandais
Après une énième faillite et un mariage calamiteux, le Président-Directeur Général Onni Rellonen estime qu’il est temps d’en finir et cherche un coin tranquille pour se tirer une balle. Malheureusement ou plutôt heureusement, dans la grange qu’il a trouvée pour abriter ses ultimes instants notre lascar tombe sur un homme en uniforme qui vient de se pendre à une poutre. C’est le colonel Hermanni Kemppainen, déçu par sa vie d’officier, que le président Onni Rellonen est bien obligé de secourir.
Remettant à plus tard leurs velléités auto-destructrices, les deux gaillards se découvrent bien des choses en commun et fraternisent. Leurs réflexions, bien arrosées, leur donnent bientôt l’idée de rassembler les suicidaires de Finlande pour mettre en commun leurs projets d’en finir. Dans la rubrique nécrologique d’un quotidien finlandais, ils glissent une petite annonce et contre toute attente, c’est une avalanche de plus de 600 lettres qui leur dégringole dessus. « Nous avons besoin d’une secrétaire » conviennent-ils et c’est ainsi que parmi les nombreux candidats à la mort sûre, ils s’adjoignent les services de la directrice adjointe Helena Puusaari, 35 ans, belle, grande et rousse.
De fil en aiguille, les trois amis vont affréter un luxueux autobus, propriété d’un des suicidaires, pour convoyer leur cargaison de déprimés les plus irréductibles vers sa dernière demeure. Émaillé de disparitions tragi-comiques, le voyage sera une virée désopilante à travers l’Europe, d’abord en direction du cap Nord pour y jeter ses désespérés dans l’océan glacial puis vers l’atmosphère plus clémente de la pointe ouest du Portugal.
De situations loufoques en banquets rabelaisiens, nos dépressifs vont découvrir la valeur de la vie et de l’amitié indéfectible, la solidarité et le relativisme. Au fur et à mesure qu’approche l’issue fatale, chaque étape sera prétexte à bombance, dégustation de spécialités locales, ingurgitation de spiritueux en quantités excessives, toniques échauffourées et bien entendu veillées philosophiques au coin du feu.
Avec « Petits suicides entre amis » Arto Paasilinna, disparu en 2018, nous fait le cadeau d’un concentré jubilatoire d’énergie et d’appétit de vivre.