Palindrome
Tenet, c’est le principe en anglais, le dogme, la doctrine. C’est surtout un mot qui se lit indifféremment dans les deux sens : un palindrome.
Les films de Christopher Nolan ont la caractéristique de malmener nos conceptions du temps : Syncopé dans Mémento, relatif dans Interstellar, émietté et télescopique dans le décevant (selon moi) Dunkerque, magistralement encapsulé dans des poupées gigognes pour le fascinant Inception, il fait penser aux œuvres impossibles de MC Escher dans Tenet.
Comme à l’accoutumée, Nolan nous torture et le scénario est d’une complexité telle que le film devra être vu, revu et métabolisé pour avoir quelque chance d’être appréhendé. Ce n’est pas La tour Montparnasse infernale … Tenet, c’est « plus je pédale moins vite, moins j’avance plus vite ». Comme dans le palindrome, c’est seulement la deuxième partie qui donne son sens à la première (une phrase un peu obscure comme un scénario de Nolan). C’est lorsque le film se termine qu’on a déjà envie de revoir cette dernière (la première, donc, vous suivez ?) pour enfin espérer comprendre tout ce qui nous a échappé, sous peine de réduire le film à deux heures trente minutes d’action pure et finalement ennuyeuse.
Le voyage dans le temps y a des allures de Looper où le héros devait tuer le père pour survivre (la condition humaine, en quelque sorte…) ; dans Tenet, c’est plutôt la lutte avec l’ange et la confrontation aux paradoxes temporels.
Comme chez Tarantino, l’humain, l’amour et l’émotion sont évacués, on est loin de « dans un jardin qu’on dirait éternel ».
Il reste que Tenet est un vrai remue-méninges qui nous rappelle que le temps qui n’existe pas, et c’est la raison pour laquelle on l’appelle le temps, n’est jamais qu’une construction intellectuelle.