Premières impressions nippones

Posté le 26 Mai 2013
 Mai 2013, mon fils ainé (vous savez : Thomas, le concepteur de ce site  admirable) et moi revenons de dix jours au pays du soleil levant. Ce  n’est pas un vain mot lorsqu’on débarque à l’aéroport Charles de Gaulle :  10°C ! Le soleil, depuis 4 ou 5 ans, boude ce qui fut – jadis – un mois  de mai si exquis dans la capitale. Cette année, c’est carrément la  cata. Ce n’était pas le cas à Tokyo, Hakone ou Kyoto, en proie à la  douceur d’un vrai printemps. Nous nous sommes même offert le luxe  suprême – pour nous, pauvres parisiens – de rapporter un teint  outrageusement hâlé. (Il y a quatre ans, j’eus la bonne idée de  découvrir le pays en été ; les cigales chantaient, et elles le pouvaient : il faisait dans les 40 °C).
 Bien que si jaloux de notre douce France, de ses verdoyants paysages, de  ses monuments lourds de 2000 ans d’histoire, de sa bonne chère si  enviée, force est de reconnaitre que d’y accéder au travers du RER B  lorsqu’on a parcouru Omote Sando, Rappongi Hill ou les alentours du  pavillon d’or, fait paraître la mère patrie terne, étriquée et surtout –  la honte – particulièrement sale.
 Au Japon, notamment à Tokyo où s’élancent chaque matin les nuées de  millions de salarymen, où l’on fume volontiers (depuis mon dernier  passage, dans d’espèces d’abribus où la rue parque désormais les  esclaves de la nicotine – mais on fume au restaurant), pas un mégot par  terre, pas un papier gras, pas une déjection de canidé. Dans le métro,  pas un tag, pas une rayure. C’est simple, on lècherait par terre.
 Et que dire des bonnes manières  de ses habitants.  Le seul rapport avec la « fourmi nipponne » qu’on a  prétendu nous vendre il y a quelques années (et l’image d’Epinal de  torrents de touristes asiatiques  qui se photographient devant nos monuments), ce sont les hordes tokyoïtes qui se déversent en  bruissant depuis des gares cyclopéennes en fendant spontanément leur  flot dense au contact des visiteurs ébahis, comme les eaux de la mer  rouge devant le peuple hébreux en fuite. Pour le reste, les japonais,  certes bruyants à table (toute occasion est bonne pour exploser de  rire), sont souriants, gais, aimables, prévenants, récurés jusqu’au bout des ongles, tirés à quatre épingles et ne peuvent construire une phrase  sans la ponctuer de « kudasai » (je vous prie) et de « arigato gozaimasu »  (merci beaucoup). J’en ai compté pas moins de 9 dans le seul compliment  de l’hôtesse japonaise après notre atterrissage. Il faut même y  réfléchir à deux fois avant de leur demander son chemin, car ils se  feraient plutôt seppuku  (vulgairement : Hara Kiri)  que de vous décevoir. Au Japon, le sens du service signifie quelque  chose. Enfin, malgré un océan de 30 millions d’âmes à Tokyo, il est  exceptionnel d’entendre un coup rageur d’avertisseur (un peu plus  souvent cependant qu’en 2009, il me semble) et le métro, large,  climatisé et constellé d’écrans plats, y est silencieux : chacun surfe,  lit ou somnole sans déranger son voisin. Personne n’y bouscule – et  encore moins n’y insulte  – personne. Presque une villégiature.
 Ajoutez à cela la lecture des incomparables « Chroniques japonaises » de Nicolas Bouvier, et vous aurez tous les ingrédients pour un voyage inoubliable en terre nipponne. 
