Prométhée

Prométhée

Guillermo del Toro qui nous a ravi avec Le labyrinthe de Pan et La forme de l’eau nous offre une œuvre monumentale qui vient de sortir sur Netflix : la vision lyrique et grandiose du Frankenstein écrit en 1816 sur les bords du lac Léman par la toute jeune Mary Shelley lorsque, pour rompre l’ennui d’un été pluvieux, lord Byron lança au cours d’une soirée l’idée d’écrire un roman d’épouvante, qui marqua le début de la littérature gothique.

C’est en 1994 que Robert de Niro avait incarné une version habitée de la créature de Victor Frankenstein dans le film de Kenneth Branagh. Ma mémoire conserve le souvenir d’un orage hallucinant dans lequel l’apprenti Prométhée détourne la détonation d’un éclair pour insuffler la vie à un assemblage de chairs de cadavres baignant dans le liquide amniotique. Le film était produit par Francis_Ford_Coppola, réalisateur du non moins gothique Dracula, sublimé par la performance de Gary Oldman.

Le film de del Toro est un véritable opéra, à mi-chemin précisément entre le Dracula de Coppola pour la splendeur gothique de ses images et celles de la version de 1994 pour la puissance qu’elles dégageaient.

Comme l’imaginaire du vampire, qui nous renvoie aux peurs ancestrales de la contamination par le sang (Pandémie tragique du Sida, terreurs des témoins de Jéhovah, crainte de la vaccination…), mais aussi au fantasme d’immortalité, le mythe du démiurge qui aux dieux dérobe le feu, est plus que jamais d’actualité dans un monde changeant, où clonage, intelligence artificielle, manipulation génétique et rêves transhumanistes se disputent la vision de l’homme du futur.

L’orgueil humain fut châtié pour la tour de Babel; le rêve de terrasser la mort sans basculer dans des soins déraisonnables pose la question du progrès scientifique et de l’éthique médicale : le meilleur des mondes sera-t-il un monde meilleur ?

Rabelais nous le rappellerait, qui écrivait « Sapience n’entre point en âme malivole et science sans conscience n’est que ruine de l’âme« .

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